Rimbaud, une association lyonnaise, lance une campagne contre les discriminations chez les jeunes. Son président nous explique la démarche.
 
 «Gouine.» Le mot s’affiche comme une insulte depuis lundi à Lyon. D’abord dans les centres d’accueil pour jeunes en difficultés. Bientôt peut-être dans les établissements scolaires, les commerces, la presse… C’est ce qu’espère Rimbaud, l’association lyonnaise à l’origine de cette affiche choc. Une fille au piquet pour son homosexualité supposée. «Condamnée pour ce qu’elle est et non pour ce qu’elle a fait, une injustice dont souffrent encore trop de jeunes au quotidien», se lamente le président, Tanguy Dufournet (photo ci-dessous). Interview.
 
TÊTUE: Qui est Rimbaud?
Tanguy Dufournet: c’est une petite association lyonnaise qui a déjà trois ans. Elle regroupe une trentaine de bénévoles. Reconnue d’intérêt général, elle lutte contre l’homophobie en proposant l’accueil, l’écoute et l’accompagnement des jeunes de 15 à 25 ans en questionnement sur leur orientation sexuelle et affective ou en rupture familiale du fait de cette orientation, qu’elle soit réelle ou supposée.
 
C’est ce qui vous est arrivé?
Alors que j’étais âgé de 15 ans, mes parents ont découvert mon homosexualité. Menacé de mort par mon père, j’ai dû partir de chez moi. Ma grand-mère m’a hébergé. Presque dix ans plus tard, ça reste une grande souffrance mais j’en ai fait un moteur. Avec les membres de Rimbaud, nous refusons de laisser des jeunes en détresse s’isoler, et pire, tenter de se suicider.
 
Est-ce l’objectif visé par cette campagne ?
Rimbaud s’inquiète du silence médiatique et politique autour du suicide des jeunes de 15 à 25 ans victimes d’homophobie, leur première cause de mortalité en France. Les tentatives de suicide sont, selon les études, de sept à treize fois supérieures chez les 15-25 ans victimes d’homophobie que dans le reste de la même classe d’âge. Les études indiquent aussi clairement que les personnes LGBT à antécédents suicidaires se protègent rarement lors de rapports sexuels avec un partenaire inconnu.
 
Vous lancez donc ce que vous appelez «un appel au secours»…
L’État français laisse toute une partie de sa jeunesse entrer dans une spirale autodestructrice qui va de la perte d’estime de soi jusqu’à la tentative de suicide en passant par de nombreux comportements à risque comme l’échec scolaire, les addictions, les rapports sexuels non-protégés ou encore l’automutilation. L’image de sous-citoyen des personnes LGBT renvoyée par l’inégalité des droits (mariage, adoption, don du sang) et l’homophobie au quotidien (morale, verbale et physique), qui sont par ailleurs également liées, ont des conséquences graves, directes et concrètes en termes de santé publique sur une jeunesse en pleine construction identitaire.
 
Que fait l’association pour aider ces jeunes?
On a mis en place un dispositif de soutien et d’accompagnement, des permanences d’accueil et d’écoute. Ces moments de discussion s’accompagnent d’un éventuel suivi régulier selon les attentes du jeune. Et la possibilité d’accéder à de nombreux services personnalisés grâce à une formation encadrée des accueillants et un réseau de partenariats. Nous proposons des animations, des groupes d’échange et de parole, ainsi qu’une médiation familiale entre le jeune et ses parents, s’il le souhaite.
 
Permanences à Lyon campus (25, rue Jaboulay, Lyon VIIe) et à l’Espace santé jeunes (66, cours Charlemagne, Lyon II). Plus d’infos sur www.association-rimbaud.org