Les chiffres de la honte de la haine LGBTIphobe en France et en Europe
La Fédération LGBTI+ appelle le gouvernement à un sursaut politique contre les agressions et discriminations LGBTIphobes et présente des axes participatifs.
Année après année, chaque 17 mai, nous assistons à l’augmentation inexorable des chiffres officiels et associatifs des crimes, délits et discriminations, à l’encontre des personnes lesbiennes, gays, bi·es, transgenres, agenres non-binaires, queers, intersexes, étrangères, racisées et travailleuses du sexe, tant en France qu’en Europe.
La Fédération LGBTI+ est en colère face à ces chiffres de 2023, communiqués en ce 17 mai 2024, reflets d’une France haineuse et transphobe.
Les raisons de la colère
En colère d’apprendre que les atteintes envers les personnes LGBTI+ ont augmenté de 13% en 2023 en France par rapport à 2022. Ce chiffre bondit même à 19% pour les crimes et délits enregistrés par la police et la gendarmerie, selon une étude du service statistique du ministère de l’Intérieur.
En colère que cette augmentation totalise 4 560 infractions contre les personnes LGBTI+. Doublement en colère puisque ces chiffres ne reflètent pas la réalité, qui est bien supérieure.On estime à seulement 20% de victimes LGBTI+ qui déposent plainte en cas de menaces ou violences, et seulement 5% en cas d’injure, selon une enquête réalisée sur la période 2012-2018.
Le rapport 2024 de SOS Homophobie révèle que 21 % des infractions et témoignages que l’association reçoit sont de nature transphobe. Soit 500 actes, contre 227 l’année précédente. L’association dénonce une « vague » transphobe avec une « libération de la parole transphobe » assumée qui incite à « une explosion des violences » contre les personnes trans.
Même en Europe !
Le nouveau rapport de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, publié le 14 mai, s’inquiète de la hausse en Europe, et en particulier en France, des violences et du harcèlement scolaire LGBTIphobes. Seule lueur à ce tableau inquiétant : les discriminations baissent globalement en Europe du fait d’une plus grande visibilité. Baisse à relativiser selon les pays.
Les atteintes physiques augmentent notamment à l’école. En France, septième pays où le harcèlement scolaire est le plus important, la situation est alarmante avec une explosion de personnes déclarant avoir déjà été victimes ; 71% en 2023 contre 44% en 2019.
À l’échelle de l’Union Européenne, le taux de personnes LGBQI+ qui déclarent avoir subi des violences physiques et/ou sexuelles a augmenté en cinq ans de 3%, soit 14% aujourd’hui.
Un risque suicidaire toujours plus élevé que la moyenne de la société
En Europe, une personne LGBTI+ sur trois déclare avoir envisagé le suicide. Taux qui monte à plus de la moitié des personnes trans, non binaires et intersexes.
Dans le monde du travail, avec un fort impact sur les ressources, le logement, le social, cette année, le 4e baromètre de l’Autre Cercle révèle que près de 3 Français·es employé·es LGBTI+ sur 10, soit 28%, déclarent encore aujourd’hui avoir été victimes d’au moins une agression LGBTIphobe au travail.
53% déclarent avoir entendu des expressions LGBTIphobes telles que « enculé » (45%), « gouine » (32%) ou encore « travelo » (29%) sur leur lieu de travail.
Enfin, le silence reste encore très prégnant : près de 4 Français·es employé·es LGBTI+ sur 10 (39%), victimes de moqueries désobligeantes ou de propos vexants, n’en ont parlé à personne.
La pourtant résistible montée de la haine LGBTIphobe
Face à cette situation en Europe et en France, la Fédération LGBTI+ appelle le gouvernement à un sursaut, des solutions existent.
La Fédération LGBTI+ demande au gouvernement de doper le plan de lutte triennale contre les discriminations et haine anti-LGBTI+ 2023-2026, où la formation y a une place prépondérante certes, mais où des manques criants se font sentir, notamment contre la transphobie.
La Fédération LGBTI+ demande au gouvernement :
- de donner accès à la PMA à toutes les personnes, dont les personnes transgenres et intersexes,
- de réformer la filiation pour qu’elle soit égalitaire pour les couples de femmes, ou les couples trans,
- de mettre en œuvre une égalité effective des couples de parents d’enfants nés par GPA d’une part, et à légaliser la GPA éthique en France d’autre part,
- de dépsychiatriser et de définitivement mettre un terme à tout validisme médical pour tous les parcours de transition, tant pour les mineur·es que les majeur·es transgenres,
- de s’opposer à toutes les initiatives de propositions de loi RN, LR visant à interdire les parcours de transition aux mineur·es, et par extension aux majeur·es transgenres, agenres, non-binaires, intersexes,
- d’ériger le principe d’autodétermination des personnes transgenres, agenres, non-binaires et intersexes, en instaurant le changement d’état civil libre et gratuit, revendication historique de la Fédération LGBTI+ depuis déjà plus de 11 ans,
- de dérouler, dans une circulaire du garde des sceaux à destination des parquets, peu au fait du critère d’identité de genre, les principes d’une politique pénale ambitieuse face à la transphobie, en rappelant la définition, le champ d’application, ce que sont les thérapies de conversion et leur interdiction en lien avec la loi de 2022,
- de créer le critère juridique de discrimination d’intersexophobie au soutien des personnes intersexes,
- d’interdire toute mutilation ou opération non vitale sur les bébés intersexes, du simple fait du constat de leur intersexuation à leur naissance,
- de faire droit à toutes les revendications portées par le Collectif Intersexe et Activistes – OII France qui défend les personnes intersexes en France,
- de ne pas se désengager de la lutte contre le VIH, les hépatites et les IST, et de faire une priorité la baisse du nombre de contaminations pour une France sans VIH, en se donnant les moyens pour une prévention, une politique de réduction des risques, d’informations claires et d’accompagnement aux risques du chemsex, et plus généralement à un traitement de santé publique de ces questions, débarrassé d’une vision répressive et pénale,
- d’abroger la loi asile récemment votée, et de défendre le droit d’asile pour tous·tes, dont les personnes LGBTI+ ayant dû fuir leur pays pour les persécutions et les menaces de mort subies, en raison de leur orientation sexuelle, identité de genre, intersexuation ou état de santé,
- d’exiger de l’OFPRA la fourniture d’un acte de naissance dans les trois mois suite à l’obtention du statut de réfugiée d’une personne demandeuse, et de ne plus imposer des délais de parfois un an ou un an et demi comme dans de trop nombreux cas,
- d’exiger de l’OFII l’arrêt du transfert à l’aveugle pour hébergement des demandeurs d’asile qui disposent d’un suivi dans les associations, collectifs ou Centres LGBTI+, créant des déracinement inutiles, des ruptures de vie sociales, et l’arrêt des moyens financiers si les personnes refusent de quitter leur environnement sécurisé qu’elles se sont construit petit à petit,
- de reconnaître un statut aux personnes travailleuses du sexe, ce qui n’est en rien antinomique avec la lutte contre la traite sexuelle des personnes et contre les réseaux organisés prostitutionnels.
Quant au plan national, la Fédération LGBTI+ demande au gouvernement
- de veiller à la réunion effective des CORAHD départementaux, comités opérationnels de lutte contre le racisme, l’antisémitisme, la haine anti-LGBT+ et les discriminations liées à l’origine, et plus encore d’obliger à l’élaboration d’un plan départemental de veille et d’actions sur ces critères sur la base d’indicateurs qualitatifs et quantifiables,
- d’étendre les conventions partenariales entre la préfecture, le parquet et les associations d’un département ou d’une grande région pour lutter efficacement contre les crimes, délits et discriminations,
- de développer de véritables partenariats pour les sensibilisations et interventions en milieu scolaire, et avoir une parole présidentielle en adéquation avec cette nécessité d’éducation sociale,
- de veiller à ce que l’Éducation nationale dote sans tarder chaque académie d’un Observatoire académique de lutte et de prévention contre les discriminations anti-LGBT+ bien effectif et de particulièrement y intégrer les associations et Centre LGBTI+ intervenant en milieu scolaire,
- d’adopter un véritable plan de lutte contre le racisme et l’homophobie dans le foot professionnel et amateur partout en France,
- de donner aux Centres LGBTI+ un statut qui leur assure une pérennité de fonctionnement sur la durée, afin d’assurer la stabilité des emplois créés.
La Fédération LGBTI+ se tient à la disposition des associations
- pour aider à la structuration de nouvelles associations et Centres LGBTI+ pour mailler le territoire hexagonal et ultra-marin de lieux ressources, comme autant d’appui de lutte contre les discriminations pointées à l’encontre des personnes LGBTI+,
- pour créer et évaluer de nouveaux indicateurs qualitatifs et quantifiables contre les haines anti-LGBTI+ en lien avec la création de ces nouvelles associations ou Centres LGBTI+,
- pour travailler à la réactivation d’une circulaire du ministère de la Justice qui refixe le périmètre des pôles anti-discrimination des parquets en France, les engagements en matière de politiques pénales afin d’unifier celles disparates appliquées dans nos ressorts au regard des expériences des associations et Centres LGBTI+, membres de la Fédération LGBTI+.
Toutes ces situations de violences et de discriminations LGBTIphobes, que nous dénonçons en ce 17 mai 2024, sont le fruit de choix politiques qui déroulent le tapis rouge aux discours réactionnaires et d’extrême droite qui nous essentialisent et qui ne reconnaissent pas les minorités sexuelles et de genre que nous sommes dans leur singularité.
Ne nous y trompons pas, après les personnes trans, intersexes, racisées, se seront les personnes lesbiennes, gays, bies, les droits des femmes, et plus spécialement les droits reproductifs en général, qui seront, et qui sont déjà visés par les réactionnaires et l’extrême droite.
Le 9 juin pour les élections européennes, souvenons-nous-en.
Toutes et tous ensemble mobilisons-nous !
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Contact
Stéphane CORBIN
Porte-parole
porte-parolat@federation-lgbti.org