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La Fédération LGBTI+ participe à la signature de cette lettre interassociative.

Objet : Demande de nomination urgente d’un·e délégué·e DILCRAH sous l’autorité directe du Premier ministre

Monsieur le Premier ministre,

Nous, organisations et personnalités engagées pour les droits des personnes LGBTQI+, signataires de cette lettre ouverte, souhaitons attirer votre attention sur l’urgence de nommer sans délai un ou une délégué·e interministériel·le à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT (DILCRAH). Ce poste, d’une importance capitale, demeure vacant depuis trop longtemps suite au départ de son précédent titulaire au cours de l’été, alors que les violences LGBTIphobes sont en augmentation constante.

L’année écoulée a malheureusement été marquée par une recrudescence d’actes de haine contre les personnes LGBTQI+, et les statistiques des associations locales et nationales témoignent d’une montée inquiétante des agressions physiques et verbales qui entretiennent un ressenti anxiogène parmi les communautés LGBTQI+ et au-delà. Dans ce contexte alarmant, le nouveau plan national contre les LGBTIphobies adopté par le précédent gouvernement et qui doit théoriquement nous permettre de relever ces défis auxquels nous faisons face est en souffrance, l’absence d’une personne dédiée à sa mise en œuvre affaiblissant considérablement son efficacité.

Il est crucial qu’un ou une délégué·e interministériel·le soit nommé·e sans délai pour coordonner les actions indispensables à la lutte contre les discriminations et pour assurer la pleine exécution de ce plan qui reste par ailleurs à être amélioré avec nos propositions à ce jour sans réponse. De plus, nous souhaitons souligner l’impérieuse nécessité de pérenniser les fonds de soutien accordés par la DILCRAH à l’échelle nationale et territoriale, et de sanctuariser les fonds exceptionnels récemment alloués aux Centres LGBTQI+. Ces financements sont essentiels pour permettre aux associations et aux structures locales de continuer à soutenir les victimes de violences et de discriminations, et à assurer leurs missions d’accueil, d’écoute et d’accompagnement qui relèvent de l’intérêt général et sont indispensables et complémentaires aux services idoines de l’Etat.

Nous tenons également à exprimer notre profonde inquiétude quant à l’attribution des responsabilités relatives à la lutte contre les discriminations en raison des orientations sexuelles et des identités de genre, ainsi qu’à l’égard des personnes intersexuées à Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur. En tant que deuxième signataire d’une loi transphobe lorsqu’il était sénateur, et s’étant systématiquement opposé à toutes les avancées des droits des personnes LGBTI ces dernières années, sa nomination suscite des craintes légitimes sur l’engagement réel du gouvernement à protéger nos communautés et à lutter contre les discriminations, d’autant que cette nomination d’un responsable politique de cette envergure n’est pas la seule au sein de votre gouvernement.

De plus, nous souhaitons rappeler votre engagement, Monsieur le Premier ministre, lors de votre déclaration de politique générale le 1er octobre, à ne pas remettre en cause les libertés et les droits acquis, pour lesquels vous avez publiquement assuré “qu’ils seraient préservés par (vos) ministres”. Cet engagement est essentiel pour rassurer nos communautés et affirmer que les avancées en matière de droits seront préservées. Au-delà, la lutte effective contre les discriminations , nécessite en urgence de renforcer les droits des personnes trans et intersexes, dans un contexte d’inflation des discours transphobes dans les médias et la classe politique.

À cet égard, et au vu du caractère interministériel de la mission de la DILCRAH, nous demandons que cette fonction soit placée sous votre autorité directe, Monsieur le Premier ministre. Cela permettrait de garantir une coordination efficace des actions entre les différents ministères et de s’assurer que les intérêts des personnes LGBTQI+ soient réellement défendus, sans être soumis à d’éventuelles influences contre-productives, voire hostiles.

Nous insistons sur la nécessité de désigner rapidement une personne compétente, légitime et irréprochable sur la lutte contre discriminations liées à l’identité de genre, l’orientation sexuelle et à l’intersexuation, avec l’autorité qui incombe à la fonction, et d’assurer que la DILCRAH relève de votre autorité directe, afin de garantir la mise en place des mesures indispensables à la protection des personnes LGBTQI+ en France.

Nous restons disponibles pour échanger à ce sujet et vous rencontrer afin de discuter de ces enjeux essentiels pour l’avenir des droits et de la sécurité des personnes LGBTQI+.

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de notre haute
considération.


Premiers signataires

Florian Baratte, président, et Catherine Tripon, porte-parole de l’Autre Cercle

Dominique Boren et Catherine Clavin, co-président·es de l’Association des Parents Gays et Lesbiens (APGL)

Christophe Caulier et Aude Rieu, co-président·es de l’Association pour la reconnaissance des droits des personnes homosexuelles et trans à l’immigration et au séjour (Ardhis)

Stéphane Corbin, porte-parole de la Fédération LGBTI+

James Leperlier, président de l’Interassociative lesbienne gaie bie et trans (Inter-LGBT)

Anaïs Perrin-Prevelle, directrice d’OUTrans 

Camille Spire, présidente d’Aides

Vi-Vi Strobel, membre de Bi’cause

Julia Torlet, présidente de SOS homophobie


Signataires

Nicolas Abi Chebel, co-président de Wassla

Ségolène Amiot, députée de Loire-Atlantique

Pierre-Jean Baty, conseiller régional Île de France, président du MoDem Paris

Frédéric Bauer, président de Couleurs gaies 

Arnaud Beaumont, rôle modèle de l’Autre Cercle, ancien président du MoDem Isère

David Belliard, adjoint à la Marie de Paris

Grégory Bernard, fondation Le Refuge

Stéphane Bernard, président de Pride Marseille

Benoit Berthe Siward, porte-parole de Rien à guérir, collectif des rescapé·es de thérapies de conversion

Christophe Berthier, secrétaire général de la délégation Bourgogne-Franche-Comté de l’Autre Cercle 

Flora Bolter, co-directrice de l’observatoire LGBTI+

Sam Bourcier, sociologue

Ian Brossat, sénateur de Paris

Mélissa Camara, députée européenne

Andrée Carment, présidente du Centre LGBTI+ Lim’Bow de Limoges 

Patricia Chuit et Marianne Souchon, co-présidentes du Centre LGBTI du Poitou

Michaëlla Clapisson, présidente des Bascos – Centre LGBT+ Sud Aquitaine

François Dagnaud, Maire du 19ème arrondissement de Paris

Gaetan Degand, secrétaire général de la délégation Provence Méditerranée de l’Autre Cercle

Jean-René Dedieu-Jourdain, co-président des Ami·es du Patchwork des noms 

Jean-Luc Dumesnil, conseiller régional d’Île-de-France

Guillaume Durand, adjoint à la Maire du 14e arrondissement de Paris

Sarah Durocher, présidente du Planning familial

Adrien Figula Letort, président de la délégation Auvergne-Rhône-Alpes de l’Autre Cercle

Andrea Fuchs, adjointe au Maire du 19ème arrondissement

Bernard Gachen, coordinateur de Nos Couleurs Centre LGBT+ Landes

Françoise Gambier, trésorière d’Homogène

Hélène Germain, présidente de la Fédération Sportive LGBT+

Guy Gaultier, président du Centre LGBT+66 Pyrénées-Orientales

Frédérick Getton, président CENTR’ÉGAUX – Association des Centristes et Démocrates LGBT+

Emmanuel Grégoire, député de Paris

Nicolas Got, président de Mobilisnoo, association LGBT+ du groupe Orange

Jean-Michel Goustour, président des Progressistes LGBT+

Em Hahn, président·e de de la délégation Île-de-France de l’Autre Cercle

Hania Hamidi, secrétaire générale de l’UNEF

Ludovic Heuzé et Alice Moreau, co-président·es de Quazar, centre LGBTI+ d’Angers et du Maine-et-Loire

Jean-Marie Hupel, co-secrétaire des Ecologistes Paris 10ème 

Morgan Jasienski, militant LGBTQIA+ et coresponsable de la commission prévention, sécurité & tranquillité publique des Écologistes

Fabien Joly, président de l’Association des familles homoparentales (ADFH)

Pierre Karleskind, ancien député européen

Jean-Luc Lagleize, ancien député de Haute-Garonne, vice-Président Centr’égaux – association des centristes et démocrates LGBT+

Eva Lekic et Clément Messence, co-président·es de Saint-Denis LGBTQI+

Aymeric Martin, président du Centre LGBTI+ Lyon

Éric Martineau, député de la Sarthe

Alexis Mauviel, co-président du MAG Jeunes LGBT+

Thomas Ologo, président d’Arc Essentiel

Melanie Perrin, présidente des Front Runners de Paris

Sarah Persil, vice président de la région Bourgogne-Franche-Comté

Noémie Pillas, directrice Centre LGBTQIA+ Marseille 

Olivier Ponsoye, vice-président des Progressistes LGBT+

Vincent Pouchol, président de Squeeriel

Denis Quinqueton, membre de la commission nationale consultative des droits de l’Homme

Daphné Ract-Madoux, ancienne sénatrice de l’Essonne, vice-présidente Centr’égaux – Association des centristes et démocrates LGBT+

Jean-Luc Roméro-Michel, adjoint à la Maire de Paris, chargé des droits humains, de l’intégration et de la lutte contre les discriminations

Sophie Roques, adjointe au Maire de Marseille et présidente d’HES LGBTI (socialistes LGBTI)

Nicolas Rottier, membre du collège de Contact France

Louis Sachy, administrateur de Flash Our True Colors, association LGBTQIA+ d’Amiens

Chloé Sagaspe, conseillère de Paris

Evelyne Sagnet, administratrice du Centre LGBTI+ Lim’Bow de Limoges

Gabriel Sampaio, co-président de D&J Arc-en-Ciel

Alexandre Schon, co-délégué de la marche des Fiertés Paris – Île-de-France

Anne Souyris, sénatrice de Paris

Samuel Tarcy, président de l’association Exaequo, centre LGBTI+ de Reims

Aline Tracol, présidente des Audacieuses et les audacieux

Stéphanie Troum, présidente du Front transfem

Laurence Vanceunebrock-Mialon, ancienne députée de l’Allier, présidente du MoDem 03, auteure de la loi contre les thérapies de conversion

Morgane Vanehuin, secrétaire du Centre d’archives LGBTQI+ Paris IDF

Riyana Vigeon, présidente de l’association ADHEOS

Anouk Veyret, membre de Fières et révolutionnaires (PCF)

Les signatures sont closes merci ! 

La tribune a été publiée le 23 octobre 2024 dans le Nouvel Obs, retrouvez le lien ici

Instituée par l’OMS il y a 35 ans, la Journée mondiale de lutte contre le Sida est à la fois une journée d’hommage aux personnes vivant aujourd’hui avec le VIH et celles que le virus a emportées, ainsi qu’un moment de prévention et de sensibilisation sur l’épidémie.

Visuel pour la journée mondiale de lutte contre VIH-Sida 2023

L’Onusida estime à 1,3 million le nombre de nouvelles infections au VIH en 2022, portant le nombre de personnes vivant avec le VIH à 39 millions. Le VIH c’est aussi 630 000 décès en 2022. Au-delà de l’aspect crucial du dépistage, la question de l’accès aux traitements est centrale dans la lutte contre le VIH dans le monde.

En France, les données nationales 2022 sont encore en consolidation. On sait déjà que le dépistage est en hausse mais toujours pas revenu au niveau d’avant la crise sanitaire liée au Covid et que les délais entre les infections et leur diagnostic continuent d’être bien trop longs.

En France et dans le monde, les combats à mener face à cette pandémie sont donc encore nombreux. Cette année, l’OMS place la journée sous le mot d’ordre de confier « le leadership aux communautés ». Donner les moyens d’agir aux structures qui connaissent le mieux leurs communautés est un levier fort de démocratie sanitaire. En France cela concerne autant des collaborations régionales regroupant des acteurs divers autour des services de l’État que le soutien aux associations communautaires engagées dans la santé.

Les données épidémiologiques permettent de distinguer des populations prioritaires dans la lutte contre le VIH. Des approches communautaires et adaptées à la réalité des vies de ces publics est donc indispensables. En effet, les moteurs les plus forts de l’épidémie sont les difficultés d’accès à la santé, les discriminations et des conditions matérielles défavorables. Les fréquentes remises en question des aides de santé pour les personnes exilées ou précaires (telles que l’AME– Aide Médicale d’État) sont une hérésie en termes de santé publique. Lutter contre le VIH c’est aussi garantir un accès digne aux soins et à la prévention à tout le monde.

Les personnes LGBTI+ ont une histoire intime avec l’épidémie de VIH. Elles ont payé un tribut terriblement lourd par les nombreux décès qui ont décimé leurs communautés. Le 1er décembre est aussi une journée pour la mémoire des “années Sida” et leurs conséquences encore bien palpables dans les vies individuelles et collectives des personnes LGBTI+.

Aujourd’hui encore, les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes sont surreprésentés dans les diagnostics de nouvelles infections. L’homophobie, toujours bien présente, et les conséquences d’années de vie dans une société moins acceptante qu’aujourd’hui font les terreaux de l’épidémie. De même, face au VIH, les personnes transgenres sont vulnérabilisées par la précarité, les violences et le manque d’accès aux droits.

Dans les Centres et associations LGBTI+, les actions de prévention et de promotion de la santé sont donc toujours réfléchies dans un accompagnement global des personnes. Faire avancer les droits humains, lutter pour davantage de respect dans la société,  améliorer la santé mentale, aider à améliorer les conditions matérielles… tout cela lutte aussi contre l’épidémie de VIH.

Découvert en 1983, le virus du Sida pourrait maintenant être éradiqué. Nous disposons de tous les outils nécessaires : modes de dépistage variés, matériels et stratégie de réduction des risques, connaissances scientifiques et suivis épidémiologiques, militant·e·s et professionnel·le·s organisé·e·s. Le dernier levier nécessaire est la volonté politique, locale, nationale et internationale.

La fin de l’épidémie est à portée de main. Aux côtés de leurs partenaires, les centres et associations de la Fédération LGBTI+ resteront engagés tant qu’il le faudra.

Journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportation

Visuel pour la Journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportationFédération LGBTI+ – sous CC BY-SA

Le dernier dimanche du mois d’avril a lieu une journée nationale d’hommage aux personnes dont le destin a croisé l’infamie humaine des camps de concentration et d’extermination. Les associations et Centres LGBTI+ seront au rendez-vous pour honorer les victimes et héros de la déportation et porter le souvenir des victimes de persécutions à raison de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre pendant la Seconde Guerre mondiale.

C’est seulement en 2005 que dans son discours à l’occasion de la journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportation, le Président de la République, Jacques Chirac, reconnait officiellement qu’il y a bien eu des personnes déportées à raison de leur orientation sexuelle ou leur identité de genre depuis le territoire français. Les associations LGBTI+ et les historien·ne·s travaillant sur la mémoire avaient apporté des preuves de ces faits depuis de nombreuses années. Désormais, que des Français·e·s aient porté le triangle rose (homosexuels) ou le triangle noir (asociaux, dont les femmes lesbiennes) n’est plus remis en question. Le rôle actif de la police française et des services de l’État Français est quant à lui trop souvent oublié.

Il est pourtant fondamental d’entretenir ce devoir de mémoire et de porter un regard éclairé sur les erreurs atroces de notre passé sous peine d’avancer aveugles vers de nouvelles horreurs. Nous nous joignons à l’exigence nationale d’honorer la mémoire de tous les déportés, “sans distinction”, comme l’exprime la loi du 14 avril 1954. Une délibération ancienne de la HALDE (Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Égalité) le rappelle : les préfectures doivent associer les associations LGBTI+ à l’organisation des cérémonies (Délibération 2009-2022 du 8 juin 2009). Cette décision n’est hélas pas toujours mise en œuvre par les services de l’État.

La perméabilité de plus en plus forte des idées d’extrême-droite dans la société, aidée d’une complaisance dans les médias et les milieux politiques, nourrit une grande inquiétude dans nos associations LGBTI+. L’extrême-droite porte une opposition viscérale aux droits des minorités sexuelles et de genre. L’historique des votes d’élu·e·s et les prises de position publique répétées de membres des partis d’extrême-droite ne ment pas. Nous ne sommes pas dupes de leurs opérations de séduction. Celles-ci rendent leur populisme encore plus détestable. 

Depuis plusieurs années, nous assistons aussi à une stigmatisation grandissante des minorités en Europe : rejet des populations exilées, violences sur les minorités sexuelles, remise en question des avancées féministes… Ce sont parfois les gouvernements de pays membres de l’Union Européenne qui orchestrent les persécutions, comme en Hongrie ou en Pologne. La France n’est pas exempte de la montée de ces courants haineux.

La Fédération LGBTI+ note aussi la pente autoritaire adoptée par plusieurs gouvernements en Europe et en particulier en France. Le durcissement des pouvoirs face à sa population, la répression des mouvements sociaux au mépris de la loi, la militarisation des forces de l’ordre sont des indicateurs sans équivoque d’un glissement pré-fascisant. Il ne s’agit pas là d’une analyse orientée que nous ferions mais bien de l’analyse partagée par plusieurs expert·e·s internationaux (ONU, Conseil de l’Europe, Amnesty International…).

Les militant·e·s qui chaque jour défendent les droits humains des personnes LGBTI+ aujourd’hui s’inscrivent dans une histoire commune de survie face à la barbarie et le mépris. C’est toujours le même élan qui les animent : la solidarité et le respect des libertés ont toujours été plus fortes que la haine et la violence

Cette histoire nous oblige dans notre devoir de mémoire. Elle nous oblige dans la défense de toutes les minorités exposées à la haine.

La Fédération LGBTI+ ne peut donc qu’encourager la participation de tou·te·s et tous aux cérémonies dimanche. Portons la mémoire de celles et ceux qui ont croisé l’horreur humaine sur leur chemin car nous savons que le ventre est encore fécond et qu’il a commencé à germer à nouveau.