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Instituée par l’OMS il y a 35 ans, la Journée mondiale de lutte contre le Sida est à la fois une journée d’hommage aux personnes vivant aujourd’hui avec le VIH et celles que le virus a emportées, ainsi qu’un moment de prévention et de sensibilisation sur l’épidémie.

Visuel pour la journée mondiale de lutte contre VIH-Sida 2023

L’Onusida estime à 1,3 million le nombre de nouvelles infections au VIH en 2022, portant le nombre de personnes vivant avec le VIH à 39 millions. Le VIH c’est aussi 630 000 décès en 2022. Au-delà de l’aspect crucial du dépistage, la question de l’accès aux traitements est centrale dans la lutte contre le VIH dans le monde.

En France, les données nationales 2022 sont encore en consolidation. On sait déjà que le dépistage est en hausse mais toujours pas revenu au niveau d’avant la crise sanitaire liée au Covid et que les délais entre les infections et leur diagnostic continuent d’être bien trop longs.

En France et dans le monde, les combats à mener face à cette pandémie sont donc encore nombreux. Cette année, l’OMS place la journée sous le mot d’ordre de confier « le leadership aux communautés ». Donner les moyens d’agir aux structures qui connaissent le mieux leurs communautés est un levier fort de démocratie sanitaire. En France cela concerne autant des collaborations régionales regroupant des acteurs divers autour des services de l’État que le soutien aux associations communautaires engagées dans la santé.

Les données épidémiologiques permettent de distinguer des populations prioritaires dans la lutte contre le VIH. Des approches communautaires et adaptées à la réalité des vies de ces publics est donc indispensables. En effet, les moteurs les plus forts de l’épidémie sont les difficultés d’accès à la santé, les discriminations et des conditions matérielles défavorables. Les fréquentes remises en question des aides de santé pour les personnes exilées ou précaires (telles que l’AME– Aide Médicale d’État) sont une hérésie en termes de santé publique. Lutter contre le VIH c’est aussi garantir un accès digne aux soins et à la prévention à tout le monde.

Les personnes LGBTI+ ont une histoire intime avec l’épidémie de VIH. Elles ont payé un tribut terriblement lourd par les nombreux décès qui ont décimé leurs communautés. Le 1er décembre est aussi une journée pour la mémoire des “années Sida” et leurs conséquences encore bien palpables dans les vies individuelles et collectives des personnes LGBTI+.

Aujourd’hui encore, les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes sont surreprésentés dans les diagnostics de nouvelles infections. L’homophobie, toujours bien présente, et les conséquences d’années de vie dans une société moins acceptante qu’aujourd’hui font les terreaux de l’épidémie. De même, face au VIH, les personnes transgenres sont vulnérabilisées par la précarité, les violences et le manque d’accès aux droits.

Dans les Centres et associations LGBTI+, les actions de prévention et de promotion de la santé sont donc toujours réfléchies dans un accompagnement global des personnes. Faire avancer les droits humains, lutter pour davantage de respect dans la société,  améliorer la santé mentale, aider à améliorer les conditions matérielles… tout cela lutte aussi contre l’épidémie de VIH.

Découvert en 1983, le virus du Sida pourrait maintenant être éradiqué. Nous disposons de tous les outils nécessaires : modes de dépistage variés, matériels et stratégie de réduction des risques, connaissances scientifiques et suivis épidémiologiques, militant·e·s et professionnel·le·s organisé·e·s. Le dernier levier nécessaire est la volonté politique, locale, nationale et internationale.

La fin de l’épidémie est à portée de main. Aux côtés de leurs partenaires, les centres et associations de la Fédération LGBTI+ resteront engagés tant qu’il le faudra.

Journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportation

Visuel pour la Journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportationFédération LGBTI+ – sous CC BY-SA

Le dernier dimanche du mois d’avril a lieu une journée nationale d’hommage aux personnes dont le destin a croisé l’infamie humaine des camps de concentration et d’extermination. Les associations et Centres LGBTI+ seront au rendez-vous pour honorer les victimes et héros de la déportation et porter le souvenir des victimes de persécutions à raison de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre pendant la Seconde Guerre mondiale.

C’est seulement en 2005 que dans son discours à l’occasion de la journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportation, le Président de la République, Jacques Chirac, reconnait officiellement qu’il y a bien eu des personnes déportées à raison de leur orientation sexuelle ou leur identité de genre depuis le territoire français. Les associations LGBTI+ et les historien·ne·s travaillant sur la mémoire avaient apporté des preuves de ces faits depuis de nombreuses années. Désormais, que des Français·e·s aient porté le triangle rose (homosexuels) ou le triangle noir (asociaux, dont les femmes lesbiennes) n’est plus remis en question. Le rôle actif de la police française et des services de l’État Français est quant à lui trop souvent oublié.

Il est pourtant fondamental d’entretenir ce devoir de mémoire et de porter un regard éclairé sur les erreurs atroces de notre passé sous peine d’avancer aveugles vers de nouvelles horreurs. Nous nous joignons à l’exigence nationale d’honorer la mémoire de tous les déportés, “sans distinction”, comme l’exprime la loi du 14 avril 1954. Une délibération ancienne de la HALDE (Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Égalité) le rappelle : les préfectures doivent associer les associations LGBTI+ à l’organisation des cérémonies (Délibération 2009-2022 du 8 juin 2009). Cette décision n’est hélas pas toujours mise en œuvre par les services de l’État.

La perméabilité de plus en plus forte des idées d’extrême-droite dans la société, aidée d’une complaisance dans les médias et les milieux politiques, nourrit une grande inquiétude dans nos associations LGBTI+. L’extrême-droite porte une opposition viscérale aux droits des minorités sexuelles et de genre. L’historique des votes d’élu·e·s et les prises de position publique répétées de membres des partis d’extrême-droite ne ment pas. Nous ne sommes pas dupes de leurs opérations de séduction. Celles-ci rendent leur populisme encore plus détestable. 

Depuis plusieurs années, nous assistons aussi à une stigmatisation grandissante des minorités en Europe : rejet des populations exilées, violences sur les minorités sexuelles, remise en question des avancées féministes… Ce sont parfois les gouvernements de pays membres de l’Union Européenne qui orchestrent les persécutions, comme en Hongrie ou en Pologne. La France n’est pas exempte de la montée de ces courants haineux.

La Fédération LGBTI+ note aussi la pente autoritaire adoptée par plusieurs gouvernements en Europe et en particulier en France. Le durcissement des pouvoirs face à sa population, la répression des mouvements sociaux au mépris de la loi, la militarisation des forces de l’ordre sont des indicateurs sans équivoque d’un glissement pré-fascisant. Il ne s’agit pas là d’une analyse orientée que nous ferions mais bien de l’analyse partagée par plusieurs expert·e·s internationaux (ONU, Conseil de l’Europe, Amnesty International…).

Les militant·e·s qui chaque jour défendent les droits humains des personnes LGBTI+ aujourd’hui s’inscrivent dans une histoire commune de survie face à la barbarie et le mépris. C’est toujours le même élan qui les animent : la solidarité et le respect des libertés ont toujours été plus fortes que la haine et la violence

Cette histoire nous oblige dans notre devoir de mémoire. Elle nous oblige dans la défense de toutes les minorités exposées à la haine.

La Fédération LGBTI+ ne peut donc qu’encourager la participation de tou·te·s et tous aux cérémonies dimanche. Portons la mémoire de celles et ceux qui ont croisé l’horreur humaine sur leur chemin car nous savons que le ventre est encore fécond et qu’il a commencé à germer à nouveau.