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Vignette communiqué de presse football

Dans un entretien à l’hebdomadaire le Point, le 4 octobre dernier, Yohann Lemaire (président de l’association Foot ensemble) préconise de « faire la pédagogie » et pointe le caractère « contre-productif » des sanctions destinées à punir l’homophobie dans les stades de football. Il réitère ainsi des propos tenus sur France Info le 2 octobre dernier. Ce positionnement ne correspond ni à celui majoritaire du mouvement LGBTI+ de France, ni à celui de la Fédération LGBTI+. Au contraire, la Fédération LGBTI+ se reconnaît davantage dans celui de Rouge Directhttps://rougedirect.org/ : elle l’a fermement condamné comme irresponsable, aux côtés de l’association Bleus et Fiers.

Sanction et prévention… dans cet ordre !

Il faut cesser d’opposer prévention et sanctions. Quel que soit le contexte, les sanctions pénales ou disciplinaires ont toujours une vertu pédagogique imparable… Mais encore faut-il qu’elles soient appliquées. Or, comme l’ont rappelé les associations précitées : dans le football, elles ne le sont pas assez… voire pas du tout !

Si les sanctions ne suffisent pas à elles seules à résorber la gangrène de l’homophobie dans les stades, il existe aujourd’hui un consensus parmi les associations LGBTI+ de France : quel que soit le contexte, il faut sévir, clairement et sans état d’âme. Quand les joueurs, les groupes de supporters et les dirigeants des associations sportives auront compris les enjeux et les risques réels, alors – peut-être – se décideront-ils enfin à engager sérieusement le travail de prévention auprès de la communauté du football.

C’est d’ailleurs précisément ce qu’a exprimé, jeudi 24 septembre dernier, la ministre des Sports, Amélie Oudéra-Castéra. À la suite des saillies homophobes lors du match PSG-OM du dimanche précédent, la ministre a ainsi déclaré qu’il faudrait revoir « le protocole d’arrêt des matchs en cas de chants homophobes, en cas d’incitation à la haine ». Nous lui donnons le point !

L’homophobie ne souffre aucune justification !

Cependant, il faut également rappeler que l’homophobie n’est pas une opinion, qu’aucun prétendu « folklore » ne la justifie, et que ce n’est pas seulement une infraction aux règles du football. C’est avant tout un délit… Un arrêt de match est donc bien peu de choses au regard de ce qu’encourent, ou plutôt de ce que devraient encourir, les auteurs de chants sexistes et homophobes bien trop fréquents dans le soi-disant « monde du football ».

Nous constatons, pour notre part, que le « monde du football » n’est ni un monde à part, ni une zone de non-droit – pas davantage que les écoles ou les salles de cinéma. Hors du stade ou après un match, tout supporter homophobe redevient collègue de travail, camarade de lycée ou membre de sa propre famille : un homophobe avec le sentiment d’impunité en plus.

Les lois et les règlements doivent donc s’appliquer à tous les homophobes, avec ou sans maillot, dans les gradins, sur les terrains de jeu comme partout ailleurs sur le territoire !

La Fédération LGBTI+ a cosigné une lettre ouverte à destination du Président de la Fédération Française de Football et des professionnels du football français, avec Rouge Direct et de nombreuses associations. Nous la reproduisons ici. La pétition est disponible sur Change.org.


Monsieur le Président,

Mesdames, Messieurs,

La Coupe du monde de football débutera le 20 novembre prochain au Qatar, Etat qui persécute, emprisonne et torture les personnes LGBT, les privant de leurs droits les plus fondamentaux.

Depuis des mois, des organisations de défense des droits humains dénoncent ces exactions. Selon Amnesty International, “les femmes et les personnes LGBT sont toujours victimes de discrimination, dans la législation et dans la pratique ». Human Rights Watch dénonce de son côté des « exactions commises par les forces de sécurité qataries contre des personnes LGBT : passages à tabac, arrestations et détentions arbitraires, violences verbales, physiques, intimidations, humiliations ».

Plusieurs personnalités politiques de toutes sensibilités, ainsi que des artistes dénoncent ces violences d’État, notamment l’auteure Virginie Despentes et l’acteur Vincent Lindon. Des sportifs ont également pris position contre ces atteintes insupportables : le champion olympique Tom Daley, les footballeurs Josh Cavallo, Eric Cantona et Philipp Lahm. Les joueurs de l’équipe de football d’Australie ont quant à eux participé à une vidéo pour dénoncer ces violations des droits humains dont sont victimes les personnes LGBT.

Que fait la Fédération Française de Football? Qu’attendent les grands clubs pour dénoncer ces violences ? Pourquoi n’entend-on AUCUN joueur de l’équipe de France prendre clairement position contre les violations des droits fondamentaux commises par le Qatar ?

Rappelons que, selon les Règlements Généraux de la Fédération Française de Football, « toute discrimination pour des raisons de race, de religion, de politique ou pour toute autre raison est interdite » et qu’ « il appartient aux instances de garantir qu’aucune atteinte ne puisse être portée à la dignité ou à l’intégrité d’une personne sur la base de ces mêmes considérations. »

Fédération, dirigeants, joueurs et arbitres du football français, vous avez le pouvoir d’être entendus par des millions de personnes. Vous devez assumer votre responsabilité morale, juridique et historique, en dénonçant les discriminations et les violations des droits fondamentaux dont sont victimes les personnes LGBT au Qatar, État organisateur de la Coupe du monde de football 2022 !

Nous demandons que vous preniez position publiquement pour défendre ces droits fondamentaux!

Cosignataires: Collectif Rouge Direct, Stop Homophobie, Amnesty International France, Ligue des Droits de l’Homme, Caroline Mécary (avocate), Etienne Deshoulières (avocat), Emmanuel Pierrat (avocat, écrivain), Jean-Baptiste Marteau (journaliste), SOS Homophobie, Fédération Sportive LGBT+, Le Coin des LGBT, ADHEOS, Sports LGBT, Mélanie Vogel (Sénatrice des Français•e•s de l’étranger), Andy Kerbrat (député Loire-Atlantique), Jean-Luc Roméro-Michel (adjoint à la Maire de Paris), Benoît Hamon (ancien Ministre), Ségolène Amiot (députée de Loire-Atlantique), Sandrine Rousseau (députée de Paris), Irène Tolleret (députée européenne), Jean-Michel Goustour (président de Progressistes LGBT+), Génération.s LGBTI+, Philippe Liotard (sociologue), Familles LGBT, Mousse, Fédération LGBTI+, Couleurs Gaies (Centre LGBTQI+ Metz), Éducation LGBT, Le Girofard (Centre LGBTIQ+ Bordeaux), Les Bascos (Centre LGBT+ Pays Basque), KAP Caraïbe, QUAZAR (Centre LGBTI+ Angers), Homogène (Centre LGBT Le Mans), Radio Stonewall, Les Séropotes, Fiertés Rurales, Solidarité Internationale LGBTQI, Fierté Montpellier Pride, Marche des Fiertés Béziers, Pride Marseille.