46 associations ont écrit à la ministre de la Santé contre l’interdiction de soins funéraires imposée aux personnes dont le certificat de décès mentionne qu’elles vivaient avec le VIH et les hépatites.
 
Les personnes vivant avec le VIH et les hépatites sont exclues des soins funéraires. Parmi les instances consultatives, le Conseil national du sida s’est prononcé contre cette mesure, le Haut conseil de Santé publique recommande de la maintenir. Ce document résume les positions des associations de personnes vivant avec le VIH et de lutte contre le sida. Il explique en quoi cette mesure n’apporte rien à la sécurité des thanatopracteurs et représente une discrimination intolérable.
 
1- Une mesure qui entretient des représentations erronées sur les risques et la sécurité des pratiques des thanatopracteurs.
 
A – La science s’oppose à cette exclusion des soins funéraires
 
– Les recommandations universelles élaborées sous l’impulsion de l’OMS à la fin des années 80 suffisent à assurer la sécurité des pratiques en matière de contamination au VIH et aux hépatites virales [1].
 
– Une circulaire de la DGS de juillet 1995 rappelle que « le virus du sida est inactivé par contact avec une solution contenant 2 à 6 p.100 de chlore actif pendant une heure sans températures spécifiques. Ceci est réputé inactiver également les différents virus hépatites. » [2].
 
L’arrêté du 20 juillet 1998 est selon le Conseil national du sida lui-même le signe d’une réglementation inutile et complexe, dont cette société savante rappelle la genèse particulièrement absurde, déconnectée de toute recommandation scientifique et de toute expertise associative [3].
 
B – Le principe de précaution ne peut être invoqué pour justifier cette exclusion
 
– Selon le Haut Conseil de Santé publique, le risque d’erreur ne peut être nul. L’exclusion des personnes vivant avec le VIH des soins funéraires serait donc justifiée par un principe de précaution. Outre que cette argumentation ne tient pas scientifiquement et épidémiologiquement (voir ci-dessous), l’avis du Haut Conseil a peu de légitimité. D’une part, il n’a pas jugé pertinent de consulter les associations de malade. Ce refus d’un principe fondamental de la démocratie sanitaire amène le Haut Conseil à véhiculer des erreurs dangereuses et discriminantes. D’autre part, le Haut Conseil se fonde sur des études américaines anciennes [4], qui ne documentent aucun cas de transmission du VIH dans le cadre professionnel d’une opération funéraire. Ces études montrent avant tout que les mesures de précautions doivent être appliquées pour tous.
 
– Le principe de précaution veut au contraire que les recommandations universelles s’appliquent à tous les cadavres. Traiter les corps des personnes dont il est connu qu’elles vivaient avec le VIH ou les hépatites différemment des autres est absurde en matière de sécurité. En effet, de nombreuses personnes ne connaissent pas leur statut sérologique [5], et face à l’exclusion dont sont victimes leur proche décédéE, familles et entourage ne signalent pas l’infection à VIH ou aux hépatites [6]. L’exclusion ne peut donc être justifiée par le principe de précaution, au contraire, elle fait courir un risque aux thanatopracteurs en entretenant une illusion de sécurité.
 
Le risque d’erreur ne concerne donc pas que les personnes dont on connaît le statut sérologique. La sécurité des professionnelLEs doit donc être assurée par la mise en place des bonnes pratiques pour tous les cadavres. Cela peut représenter des efforts en matière de formation, de conditions de travail, mais l’exclusion de personnes qui vivaient avec le VIH ou les hépatites n’a aucune pertinence.
 
2- Une discrimination insoutenable
 
– C’est le rôle des professionnelLEs du funéraire d’aider au mieux les proches de la personne décédée à faire face à sa mort en assurant une cérémonie la plus digne et la plus propice au deuil. L’absence de soins funéraires a pour conséquence l’exposition de corps abîmés qui accroît la détresse de l’entourage [7].
 
– L’idée de ce qu’on fera de leurs corps à leur mort est insupportable aux personnes vivant avec le VIH et les hépatites et contribue à renforce le sentiment de mal-être et l’exclusion réelle dont elles font l’objet [8].
 
En soutenant cette mesure depuis 1998, le gouvernement discrimine publiquement les personnes vivant avec le VIH et les hépatites et invalide ses programmes de lutte contre la stigmatisation : puisqu’une absurdité peut justifier qu’on exclue les PVVIH des soins funéraires, pourquoi les dentistes [9] n’en feraient-ils pas autant ? Les masseurs ? Les infirmières ? A toutes les personnes responsables de discriminations envers les PVVIH par une peur irrationnelle de la contamination, le ministère de la santé et le Haut Conseil de Santé publique, avec la mesure concernant les soins funéraires, leur disent : « vous avez raison, on n’est jamais trop prudent » !
 
Pour toutes ces raisons, cette interdiction doit être levée.
 
 
  • Signataires :
Act Up-Paris, Act Up Sud-Ouest, Actif santé, Action Sida Martinique, Actions traitements, ADHEOS Centre LGBT de Charente-Maritime, Afrique Avenir, Aides, An nou allé, ARAP-Rubis, ARIS-Lyon-Centre LGBTI, Association & BraiseZ, Association Frenchymymy, Association les petits bonheurs, Association Nationale Transgenre, Autres Regards, Cabiria, Centre Gay Lesbien Bi et Trans de Rennes, CheZ VioleTTe, Collectif contre l’homophobie, Comité Idaho, Coordination Interpride France, Couvent des 69 Gaules des Soeurs de la Perpétuelle Indulgence, ELCS, Envie, F&eacu
te;dération LGBT,
Fiertés de Provence, Forum Gay et Lesbien de Lyon, Handi-social, Homogène, Inter-LGBT, Les Amis du Bus des Femmes, Lesbian & Gay Pride de Lyon, Lesbian & Gay Pride Montpellier Languedoc-Roussillon, Paillettes Radicales, Paroles, Paroles Autour de la Santé, Réseau Regard, Sidaction, SNEG, SNESUP-FSU, Solidarité sida, Solthis, Strass, Support Transgenre Strasbourg, UNALS, Union Syndicale Solidaires
 
  • Notes
[1]
– Note valant avis sur les opérations funéraires pour les personnes décédées infectées par le VIH, 12 mars 2009, Deuxième partie partie
– Lire aussi Opérations funéraires : le CNS s’inquiète du maintien de l’interdiction des soins de conservation pour les personnes décédées infectées par le VIH, communiqué, 20 décembre 2011.
[2] Circulaire n°DGS/VS3/MSP/MIE/SG/1995/36 du 31 juillet 1995 relative aux prescriptions applicables aux chambres funéraires, BO ministère de la santé publique et de l’assurance maladie, n°95-36, p 209.
[3] Note valant avis sur les opérations funéraires pour les personnes décédées infectées par le VIH, 12 mars 2009, Deuxième partie partie.
[4] Communiqué d’Elus Locaux contre le Sida (ELCS), à la parution de l’avis du Haut Conseil de Santé publique, 15 janvier 2010.
[5] « Une campagne pour inciter au dépistage du VIH /sida », communiqué du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Santé, 1er décembre 2010.
[6] Expertise associative
[7] Expertise associative
[8] Voir par exemple Ce témoignage.
[9] La discrimination que subissent les PVVIH de la part des dentistes est illégale, mais récurrente. Elle est justifiée par les mêmes absurdités que celles énoncées par le Haut Conseil de santé publique.
La nouvelle loi fondamentale hongroise, très controversée, est entrée en vigueur hier à l’initiative du premier ministre conservateur Viktor Orban. Les homos et les femmes sont les premiers à pâtir de ce nouveau texte.
 
Critiqué et qualifié d’«autocrate» par l’opposition de gauche et écologique et par de nombreux mouvements de la société civile hongroise, faisant fi des critiques de l’Union européenne quant à la compatibilité des lois promulguées avec le droit communautaire, ignorant les inquiétudes de Washington sur «la démocratie» dans son pays, le premier ministre Viktor Orban (photo) fait front. Depuis 18 mois, il remodèle la Hongrie comme il en a envie, s’appuyant sur une majorité des deux-tiers au Parlement du parti conservateur dont il est le chef de file, le Fidesz.
 
L’avortement en danger
Une nouvelle Constitution hongroise, aux accents très nationalistes et de ce fait très controversée, est entrée en vigueur hier. Elle inclut des mesures que l’opposition qualifie de liberticides et touche à toutes les sphères de la société. Notamment aux droits des LGBT, auxquels elle porte un sacré coup d’épée: la Constitution stipule désormais que le mariage ne peut avoir lieu qu’entre un homme et une femme, excluant logiquement les unions entre personnes de même sexe.
 
La nouvelle Constitution touche aussi aux droits des femmes en décrétant que l’embryon est un être humain dès le début de la grossesse, ce qui fait craindre à des mouvements de la société civile et à l’opposition que l’avortement sera désormais difficile (une loi de 1986 autorise actuellement l’interruption volontaire de grossesse. Le délai légal de 12 semaines peut être prolongé en cas de viol ou sur indication médicale).
 
«Dieu bénisse les Hongrois»
Autre changement -pour le moins révélateur- induit par la nouvelle Constitution, l’appellation «République de Hongrie» disparaît au profit de la seule «Hongrie». Dans le nouveau texte figure aussi une référence explicite à «Dieu»: «Dieu bénisse les Hongrois».
 
Parmi ces lois, certaines ont une valeur constitutionnelle et ne pourront donc être modifiées que par une majorité des deux-tiers des députés. Or, il est peu probable à l’avenir qu’un gouvernement issu de l’opposition dispose d’une telle majorité.
 
«Nationalisme xénophobe»
Guy Verhofstadt, ancien Premier ministre belge et president des Libéraux au Parlement européen, considère la nouvelle Constitution hongroise comme le «cheval de Troie d’un système politique plus autoritaire fondé sur la perpétuation du pouvoir d’un seul parti». Un éditorialiste du Guardian, quotidien britannique, craint quant à lui que «le nationalisme xénophobe de M. Orban devienne la norme» en Europe centrale.