Photo de la Cour d'appel de Toulouse

Au sujet du délibéré du 9 février 2022 de la Cour d’Appel de Toulouse

Depuis bientôt huit ans, un couple de femmes, Claire et Marie, se bat pour faire reconnaître en justice la double filiation maternelle de leur fille.

Bien qu’elle ait été conçue après le changement d’état civil de Claire, et qu’un acte de reconnaissance maternelle ait été effectué avant la naissance de son enfant, Claire n’a toujours pas de lien de filiation maternelle reconnu, en raison de sa transidentité. En 2018, les juges de la Cour d’Appel de Montpellier avaient réfléchi à un statut juridique nouveau, celui de parent biologique, qui a été rejeté par la Cour de Cassation en septembre 2020. L’APGL est intervenue aux côtés de Claire depuis la procédure en Cassation. Un recours a été déposé à la CEDH : la requête vise à autoriser Claire à pouvoir établir son lien de filiation par la voie de la reconnaissance maternelle. En attendant le jugement de la juridiction européenne, l’affaire est arrivée au bout d’une solution acceptable pour Claire en France, depuis qu’elle et Marie ont été entendue par les magistrats de la Cour d’Appel de Toulouse en décembre 2021. Le délibéré, qui a été rendu public ce mercredi, 9 février 2022, retient des trois options envisagées, la plus juste : celle qui avait été demandée par Claire, Marie, leur fille par l’intermédiaire de son représentant et l’APGL.


Les signataires se félicitent de la solution (enfin !) retenue par la justice d’établir la filiation, qualifiée de maternelle, entre Claire et sa fille, qui consacre la possibilité pour une mère trans d’être reconnue comme telle, sans avoir à adopter son propre enfant.


C’est une première en France !


Les signataires saluent l’avancée de la France, qui montre à nos voisins européens le chemin pour une vision progressiste de la filiation des personnes trans.


Les signataires rappellent cependant qu’une procédure judiciaire longue de 8 ans est inacceptable, et en appelle au législateur afin que les autres familles de parents trans n’aient pas à subir le même parcours, et puissent établir leur filiation par simple reconnaissance.


Signataires : Acceptess-T, APGL, Divergenre, Fédération LGBTI+, GIAPS, Inter LGBT, LDH, OUTrans, RITA.
Contact : parentalite.trans@apgl.fr


Annexe


Pour rappel, trois options se profilaient à l’horizon :


Option 1
La plus « probable », car c’était celle proposée par le parquet général de Toulouse (et déjà proposé par l’avocate générale de la Cour de Cassation) :
● Filiation maternelle établie par la voie judiciaire MAIS :
● Mention marginale sur l’acte de naissance de l’enfant du jugement ordonnant le changement d’état civil de Claire
=> Dans ce cas, recours CEDH sur la mention marginale, visible sur toute copie intégrale de l’acte de naissance et donc attentatoire à la vie privée de l’enfant et du parent.

Option 2
Celle qui avait été demandée par Claire, Marie, leur fille par l’intermédiaire de son représentant et l’APGL (faute de ne pouvoir établir la filiation maternelle sur la base de la reconnaissance maternelle effectuée par Claire avant la naissance).
● Filiation maternelle établie par la voie judiciaire AVEC :
● Mention marginale sur l’acte de naissance de l’enfant de l’arrêt de la Cour d’Appel de Toulouse établissant la filiation entre Claire et sa fille
=> Dans ce cas demande satisfaite, et il ne restera plus à la CEDH qu’à trancher sur le refus de la France de laisser Claire procéder à une simple reconnaissance maternelle (recours déjà en cours).


Option 3
Celle proposée par la Cour de Cassation
● Filiation paternelle, par voie de reconnaissance OU :
● Filiation maternelle par l’adoption de l’enfant du conjoint
NB : ces solutions revenaient à laisser l’acte de naissance de l’enfant tel quel puisqu’elles ne sont réalisables ni l’une ni l’autre. La première solution n’est pas possible car une femme ne peut souscrire une reconnaissance paternelle et la seconde suppose que Marie donne son accord à une telle procédure, ce qu’elle refuse comme elle en a tout à fait le droit, leur enfant ayant été conçu au sein de leur couple.
=> Dans ce cas, situation catastrophique : recours CEDH pour le tout, et poursuite du combat judiciaire pour Claire et Marie qui n’auront toujours pas de double filiation pour leur fille. Dans l’attente : pas de transmission du nom, pas d’autorité parentale, pas de dévolution successorale.