Réunis à Lyon le 10 et 11 février lors de leurs rencontres nationales, les centres et associations LGBTI+ de France s’indignent de la décision du Tribunal administratif de Nantes annulant la subvention de NOSIG – Centre LGBTI+ de Nantes.
Par une décision en date du 7 février 2018, le Tribunal administratif de Nantes a annulé la subvention de 22 000 € accordée en 2016 par la municipalité nantaise à NOSIG (Centre LGBTI+ de Nantes). Cette décision fait suite au recours contre une délibération du conseil municipal de Nantes par une personne proche de La Manif Pour Tous. La Ville de Nantes a immédiatement fait appel de cette décision à la portée inquiétante pour les associations LGBTI de France, et au-delà pour l’ensemble des associations loi 1901 du pays.
Le principal moyen retenu par le juge administratif est le « motif politique » des activités de l’association. Il invoque la participation de l’association aux mobilisations en faveur du mariage pour tous et de l’égalité de traitement des femmes pour accéder à l’assistance médicale à la procréation. Il pointe la contribution démocratique du Centre LGBTI aux débats de société sur la gestation pour autrui.
Cette décision est surprenante et indigne à plus d’un titre
Chacun·e comprend qu’une commune ne puisse subventionner une association ayant des engagements « politiques et partisans, c’est-à-dire lorsque son objet consiste à combattre une « formation politique reconnue » (Conseil d’État 2002, Commune de Draguignan). Mais nos associations ne sont pas concernées, puisqu’elles revendiquent une totale indépendance vis-à-vis des partis. La conception du « motif politique » défendue par le Tribunal administratif de Nantes est toute autre : masqué derrière une conception étroite de « l’ordre public français », le juge administratif nantais interdit en réalité tout discours critique sur l’ordre moral !
Point d’importance : le Tribunal administratif de Nantes invoque le caractère illégal de la gestation pour autrui (GPA) pour justifier l’annulation de la subvention municipale. Il fait ainsi sortir la GPA du périmètre de la délibération démocratique légitime. C’est pour nous une position abusive et scandaleuse, d’autant que ni le mouvement LGBTI, ni NOSIG, n’a de position tranchée ou irréfléchie sur ce sujet complexe. Pour autant, oserait-on mettre fin au financement des travaux des chercheur·se·s qui prennent des positions nuancées sur ces questions ? Ou encore au subventionnement de tout titre de presse qui oserait briser ce prétendu “tabou”, ou évoquer la pluralité des opinions sur ce point ?
Si l’on poursuit le raisonnement, l’argument du TA de Nantes conduit à ériger l’interdiction de la GPA en dogme incontestable, et la justice administrative en inquisition. Jusqu’à ce que règne la dictature dont rêvent les intégristes, les citoyen·ne·s de ce pays sont libres de demander qu’une loi soit changée.
Après avoir essuyé l’échec politique de ses campagnes minoritaires, La Manif Pour Tous et ses partisans se trouvent désormais acculés à attaquer les associations LGBTI sur le plan judiciaire. Nous suivons par ailleurs avec attention la requête déposée par ce groupe homophobe devant le tribunal administratif de Toulon pour faire annuler la subvention municipale de Marseille destinée à financer l’Europride de Marseille en… 2013.
Les attaques judiciaires de La Manif Pour Tous constituent une menace réelle pour les minorités sexuelles et de genre et, au-delà, pour tout le secteur associatif dont l’objet consiste à défendre les droits des personnes (associations de patient⋅e⋅s, associations du travail social à destination des migrant·e·s, etc.).
Nous rappelons l’essentiel : nous faisons œuvre de solidarité et de lien social, et nous contribuons au débat démocratique dans le cadre de la République. À ce titre, les municipalités font œuvre de justice en reconnaissant, par des subventions, que notre engagement est entièrement tourné vers l’intérêt général. Le juge administratif, rendant ses jugements au nom du Peuple Français, ne doit pas s’ériger en défenseur zélé d’un ordre moral qui violerait les droits des personnes.
La Fédération LGBTI+ adresse sa totale solidarité à NOSIG et suivra de près l’arrêt de la Cour administrative d’appel.