Communiqué de la FÉDÉRATION LGBT et de l’ASSOCIATION NATIONALE TRANSGENRE
 
Vote à l’unanimité du projet de loi sur le harcèlement sexuel.
 
Le 25 juillet, l’Assemblée nationale a adopté le nouveau projet de loi relatif au harcèlement sexuel, pour combler le vide juridique laissé par l’abrogation, le 4 mai dernier, du texte existant, jugé trop imprécis par le Conseil constitutionnel.
 
Après le vote du Sénat, le texte présenté par Christiane Taubira, garde des Sceaux, et Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes, apporte une définition plus ciselée, intégrant le harcèlement par acte unique présentant une particulière gravité. Il aligne aussi le délit de harcèlement moral dans le travail sur celui du harcèlement sexuel.
 
C’est une avancée importante pour toutes les femmes, encore trop souvent victimes de ces délits d’un autre âge, symboles du machisme et du sexisme qui sévissent encore, et que notre société souhaite réprimer sans faiblesse, bien que les débats dans l’hémicycle aient buté sur l’incohérence des peines ; le harcèlement sexuel (2 ans de prison et 30000 euro d’amende) est moins réprimé que le vol (3 ans et 45000 euro).
 
Cette belle avancée est hélas entachée par une limitation qui, paradoxe absurde, renvoie la notion de femme à sa stricte définition biologique. En effet, l’article 2 bis de ce texte crée un 19e critère légal de discrimination, en intégrant à l’article 225-1 du code pénal la notion d’« identité sexuelle », présenté comme étant celui de la transphobie.
 
Pourtant, malgré les demandes de nombreuses associations, de plusieurs sénatrices et députées socialistes, et l’intervention de Sergio Coronado, du groupe EELV, le gouvernement a refusé d’amender « l’identité sexuelle » par « l’identité de genre », au motif que cette notion n’était pas définie dans le droit. Or, l’identité sexuelle n’est pas plus définie dans notre droit positif.
 
De ce fait, des dizaines de milliers de femmes transgenres, en cours de transition, ou à qui l’État refuse un changement d’état civil, pourraient se retrouver sans protection juridique selon la formule indéfinie « d’identité sexuelle ».
En renonçant à légiférer sur l’identité de genre, les parlementaires laissent en réalité aux tribunaux le soin de juger si les femmes transgenres sont, ou non, protégées au titre de cette confuse notion, qu’aucun élu n’a pu définir. S’agit-il de la biologie des personnes ? De l’état-civil ? Nul ne le sait. Au vu des positions de la Cour de cassation, qui s’oppose à toutes
les avancées européennes en matière d’identité de genre, et de sa jurisprudence réactionnaire sur le changement d’état civil des personnes transgenres, nous avons les plus grandes craintes sur l’interprétation restrictive de ce nouveau critère qui pourrait être donnée par les tribunaux français.
 
En fait, le gouvernement voulait un vote unanime des sénateurs et des députés. Pour l’obtenir d’élus UMP profondément réactionnaires, et ils l’ont démontré lors des débats en critiquant la notion de genre, le gouvernement a hélas fait le choix de ne pas intégrer l’identité de genre dans la loi. C’est un rendez-vous raté.
 
Pourtant, c’est bien la notion d’identité de genre qui est reconnue de façon spécifique par le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe dans « Droits de l’homme et identité de genre ». Et c’est bien l’identité de genre qui est au coeur de la résolution 1728 (2010) du Conseil de l’Europe, dite « Discrimination sur la base de l’orientation sexuelle
et de l’identité de genre », votée le 29 avril 2010 par la France et qui stipule : « La discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre peut être exacerbée en raison du sexe et du genre, les femmes lesbiennes, bisexuelles et transgenres, en particulier, courant un risque accru de violence. »
 
Najat Vallaud-Belkacem, porte-parole du gouvernement, a justifié sa position en renvoyant les personnes transgenres au vote d’un projet de loi spécifique sur la question du genre. Quand le gouvernement compte-t-il présenter un tel projet de loi faisant de l’identité de genre une réalité juridique, dans les domaines transversaux du travail, de la santé et de la discrimination, entre autres ?
 
Pour nos associations il y a urgence, d’autant que la plateforme commune de revendications de la Campagne LGBT 2012, portée par la Coordination InterPride France, la Fédération LGBT et l’Inter-LGBT, et que de nombreux élus ont signé, contient dans son corpus les points précis suivants :
 
• Inclure l’identité de genre parmi les motifs de discriminations reconnues par la loi.
• Mettre en adéquation l’ensemble des lois françaises avec la résolution 1728 (2010) votée par la France au Conseil de l’Europe en matière de droits pour les personnes trans.
• Changement d’état civil des personnes trans en application de la résolution 1728 (2010) qui demande que les pays accordent " des documents officiels reflétant l’identité de genre choisie, sans obligation préalable de subir une stérilisation ou d’autres procédures médicales comme une opération de conversion sexuelle ou une thérapie hormonale " (point 16.11.2).
• Permettre le retrait des « troubles de l’identité de genre » de la liste des maladies mentales de l’OMS.
• Permettre la prise en charge des transitions, faites en France ou à l’étranger, pour celles et ceux qui le souhaitent en garantissant le libre choix du ou des médecins.
Levée de l’interdiction des soins funéraires pour les personnes porteuses du VIH et des hépatites.
Nos associations écrivent à Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé.
 
 
Madame la ministre,
 
Le 12 juin dernier [1] nous avons publié un communiqué annonçant que nous étions prêtEs à vous offrir un stylo pour signer la levée de l’interdiction des soins funéraires pour les personnes séropositives.
 
Cela fait désormais 6 semaines que vous avez été nommée ministre des affaires sociales et de la santé.
 
Alors que votre parti avait pris position pour la levée de cette interdiction avant les élections, alors que l’ancien ministre de la santé a tenu à nous informer que les textes étaient prêts et n’attendaient que votre signature, alors que nous avons démontré qu’il n’y avait aucune justification scientifique pour surseoir à cette décision, alors que nous n’en pouvons plus du mépris qui nous a été infligé ces dernières années, nous nous étonnons de n’avoir aucune nouvelle de votre part.
 
Le gouvernement auquel vous appartenez a été nommé par un président élu en disant que "le changement c’est maintenant". Attendre sur une question si facile à résoudre serait un bien mauvais signal. Notre patience ayant des limites, soyez assurée, madame la ministre que, en l’absence d’une réponse de votre part, nous nous tenons prêtEs à vous amener directement au ministère le stylo pour signer cette levée de l’interdiction.
 
Avec nos salutations respectueuses,
 
Signataires :
Act Up-Paris, Act Up sud-ouest, Actions Traitements, ADHEOS, Afrique Avenir, Aides, An Nou Allé, ARAP-Rubis, Arc En Ciel Toulouse, Autres Regards, Association & BraiseZ, Association Frenchymymy, Association GAPS, Association Nationale Transgenre, Centre LGBT Nantes, Centre LGBT Orléans, Collectif contre l’homophobie (Montpellier), Comité IDAHO, ELCS, Ensemble pour une santé solidaire, Equinoxe Nancy Lorraine, Fédération LGBT, Fiertés de Provence, Forum Gay et Lesbien de Lyon, Handi-Social, Homodonneur , Homogène, Patchwork des noms, Les Amis du Bus des Femmes, Lesbian and Gay Pride de Lyon, les Municigays de Marseille, Quazar Centre LGBT d’Angers, Paroles Autour de la Santé, Sidaction, SNEG, STRASS, Support Transgenre Strasbourg.
 
 
 
[1] Levée de l’interdiction des soins funéraires pour les PVVIH : S’il ne manque qu’un stylo pour signer nous l’offrons à Marisol Touraine ! Lire ici.